Assurance-vie : une épargne résiliente au service du bien commun
Tribune Libre d'Hugues Aubry publiée sur Les Echos.fr le 26 février 2024
Alors que l'année 2023 a vu resurgir les interrogations sur la pérennité de l'assurance-vie française, ce produit d'épargne démontre une nouvelle fois sa résilience. Il s'impose comme un modèle de finance durable, capable d'amortir les soubresauts économiques et géopolitiques.
Cette année encore, certains annoncent l’irrémédiable déclin de l’assurance-vie. Cette rengaine revient à intervalles réguliers, généralement lors de la saison des vœux. Elle se fonde sur une analyse très elliptique de l’évolution des encours des contrats d’assurance-vie. Rien n’irait plus dans le monde de l’assurance-vie puisqu’en 4 ans, les encours des fonds en euros ont décru de 2 milliards d’euros, alors que sur la même période les encours de l’assurance-vie ont progressé de plus de 7 %, pour atteindre 1 923 milliards d’euros.
En réalité, l’assurance-vie se transforme et accélère sa diversification vers des nouveaux supports ; depuis 2019 les encours en unités de compte ont progressé de 34 %. En 5 ans, sous l’impulsion de la loi Pacte, l’assurance-vie s’est réinventée pour apporter une réponse à cette question centrale pour nos sociétés contemporaines : comment créer de la valeur pour les épargnants tout en protégeant au mieux nos biens communs et universels ?
Logique gagnante
Le produit préféré des Français est en réalité en train de réussir sa transition vers une diversification des supports plaçant en leur cœur l’économie réelle et les critères ESG. En 2023, la part des unités de compte dans la collecte d’assurance-vie représente 41 % pour partie investis dans l’économie du quotidien, la transition énergétique ou les investissements de demain. D’autant que dorénavant, tout le monde s’accorde à dire que l’investissement responsable ne pénalise pas la performance.
A titre d’illustration, le fonds GF Ambition Solidaire enregistre une performance annualisée de plus de 8 % sur 5 ans et de plus de 15 % en 2023, au-dessus de son indice de référence. L’assurance-vie crée et encourage une double soutenabilité : soutenabilité du patrimoine des Français en créant de la valeur, soutenabilité de la société en finançant une économie plus respectueuse des biens communs et de l’environnement.
Finance responsable et de long terme
Cette double soutenabilité doit servir de repère pour la finance et l’épargne dans ce monde traversé par des transformations profondes et brutales : dérèglement climatique, crise sanitaire, crises géopolitiques, crise inflationniste… Depuis la crise de la Covid-19, les certitudes du matin deviennent les incertitudes du soir. Qui aurait pu prévoir ces tensions inflationnistes et leurs reflux ces derniers mois sous l’effet de l’action des banques centrales ? Qui aurait pu prévoir ces incertitudes géopolitiques majeures ? Depuis la remontée des taux d’intérêt en 2022, les comptes-rendus des réunions des banquiers centraux sont plus analysés que les décisions elles-mêmes. Ces documents deviennent des oracles provoquant une certaine fébrilité sur les marchés et donc des risques de volatilité accrus.
En 2024, dans la foulée des anticipations de ralentissement de l’inflation, voire des prémices d’une récession, nous pourrions être confrontés à une forte variabilité des taux longs qui poserait à nouveau des défis à certains produits d’épargne. Ces pics de tensions tendent à dévier l’attention vers le temps court, les gains (ou les pertes) à court-terme et à privilégier des choix d’investissements générant des externalités négatives pour l’avenir.
Dans ce contexte de fortes turbulences, garder un cap fondé sur la diversification des supports d’investissement et sur le temps long permet de traverser les cycles en atténuant les "à-coups" des effets de mode. Maintenir cet horizon est vertueux pour notre société et pour les épargnants. En un mot, ayons le courage de rester lucides pour devenir réellement durables.
Expert lié
Hugues Aubry
Directeur en charge du marché de l’Epargne et de la Gestion de Patrimoine